dimanche 29 octobre 2006

LPCMI 2006: M et N comme...

M comme Moment(s) Magique(s)

Il y en a eu quelques uns cet été. Pour mémoire, je citerai dans l’ordre chronologique le 9 juillet. Mon anniversaire, certes, que nous fêtâmes avec Elsa à St Florent, petite cité balnéaire pour laquelle j’éprouve une affection particulière. Je garde en outre d’excellents souvenirs de gueuletons intimes au « Petit Caporal » en plein hiver, loin de la furia touristique. Là, c’est un bain de foule que nous sommes venus chercher. Attablés à l’Hotel de l’Europe (tenu par les ex-proprios du Petit Caporal, d’où notre présence), nous dégustons des fruits de mer et autres poissons en suivant la finale de la Coupe du Monde de football. En guise de cadeau, l’équipe de France m’offre une défaite à laquelle j’avais fini par ne plus croire. Merci !

Rappelons nous aussi de l’après-midi improvisée à Bastia avec Elsa, qui sortait tout juste de son boulot au Conseil Général, et le couple Nico/Sophie. Un gros Saint Pierre dégusté à quatre lors d’un dîner sur le vieux port, suivi une glace monstrueuse chez Raugi, le maître Bastiais, à la nuit tombée, nous avaient fait passer une journée superbe.


Nico, Sophie, et Elsa, et mon ex phone portable, prennent la pose sur le vieux port de Bastia.

Enfin, le concert des Muvrini à Levie, au coeur de l’Alta Rocca, garde une place à part. Sous le ciel étoilé, derrière l’église du village, les voix mêlées des frangins Bernardini, le spectacle de lumières (le même qu’à Bercy) furent comme d’habitude de haut vol. C’est sûr, c’est une ambiance différente des Chjami Aghjalesi au col de Pratu, c’est plus « grand public », c’est plus « commercial ». Et puis après ? L’émotion était en tous cas au rendez vous, et je dois avouer que quelques morceaux m’ont donné la chair de poule, voire des frissons. J’ai retrouvé des sensations d’adolescent, vécues à Felce, pour le « Giru 1992 » de l’album « Noi ». Quand on dit que la musique fait voyager dans le temps…

M comme Mathieu

Je connaissais un peu Mathieu avant de bosser avec lui à Zonza*. Nous partagions, avant ce séjour fructueux d’un point de vue de l’amitié, le même conseiller de stage BE (Manu pour ne pas le nommer), un penchant certain pour les réputations sulfureuses et un goût immodéré pour les blagues les plus grasses.

Deux mois plus tard, nous avons tant de choses en commun : un dégoût tout aussi immodéré de l’eau de la Purcaraccia**, la même vision des gens qu’il « considère comme inutiles », et « c’est tout ce qu’ [il a] à leur dire », et bien sûr des centaines de moments de bonheur, vécus dans les canyons, dans notre chambre, sur (ou sous ?) un quad*, ou encore dans notre antique grenier qui servait de pièce de vie commune.

Excellent grimpeur, beau gosse, provocateur hors pair, il est difficile de résumer ce bouillonnant camarade de jeu âgé d’un quart de siècle en une seule phrase. Si je devais me risquer à cet exercice, je citerais l’intéressé :

« On a beau parler de l’égalité des sexes, une femme, quand elle a 17 cm de viande dans le col de l’utérus, c’est l’être le plus soumis du monde ».


L’incorrigible Mathieu Blanchard, un fantastique compagnon capable de friser la poésie comme de déborder de grossièreté : un type en or !

M comme Mouskif

Beau petit félin que cet amusant animal. Tantôt joueur, tantôt calme, tantôt presque bestial, il s’est défait de tous les garde-fous de son maître (et geôlier), le Foué* pour réussir à s’échapper de son grenier sous les tuiles, au prix d’acrobaties incroyables. Je l’aime bien, moi, Mouskif.

N comme Nerveux

J’ai la réputation d’être nerveux, voire très nerveux. Une habitude, une façon d’être. Ma nature méditerranéenne, mon côté sanguin. Elsa me le reproche assez souvent, je ne le nie pas. Mon expérience en montagne s’étant jusqu’alors faite en très grande partie avec des gens compétents et ponctuels, il a fallu un temps d’adaptation. Voir une demi douzaine de clients arriver avec trois quarts d’heure de retard un jour où l’orage* est prévu pour la mi journée a de quoi me mettre hors de moi. Il m’arrive de ne me relâcher envers ces retardataires qu’en milieu de canyon…

Un matin, cela faisait deux jours consécutifs que mes clients se pointaient au local systématiquement les derniers. Il m’en manquait un paquet. Lorsqu’une partie se présente, il n’est pourtant que huit heures et quart à peine sonnées. Je rugis :

« Il est 817 ! Vous êtes en retard ! »
- Désolé, on croyait que c’était 8h30
- La ponctualité est une qualité !

Le Foué*, toujours zen, et qui passait par là les bras chargés de baudriers, intervint de façon imparable pour désamorcer mon courroux.

- La patience aussi, Romain.

Nous partîmes dans un grand éclat de rire tant cette réplique m’avait cloué, comme un magnifique coup droit décroisé le long de la ligne. Je n’avais même pas eu le temps de bouger. J’ai regardé la balle fuser, bouche bée… 15-0 pour « La vache placide de Bavella »***…


Une image rare : le L totalement détendu, calme, zen. Un cliché qui fera date.

** Voir "V comme Vomir", pour changer
*** Voir "S comme Surnoms"

vendredi 27 octobre 2006

LPCMI 2006: I,J,K,L comme...

I comme Incompréhensible

Comme dirait le Foué*, avoir son corps pendu à 40m du sol n’est pas une situation normale pour un être humain. Ainsi, il peut avoir des réactions totalement imprévisibles. En formation du BE, l’une des premières choses que l’on apprend est de ne jamais faire confiance à un client. Le Jouy, que j’ai eu par téléphone* hier alors qu’il finissait sa toute première journée de Fondamentaux à l’ENSA (le tout début de la formation d’Aspi), s’est entendu dire que « Les clients vont tout vous faire, même ce que vous n’aurez pas prévu ». Comme c’est vrai !

Pour ne citer que deux exemples, je me souviens d’un client (gérant une entreprise) ne sachant plus faire la distinction entre son pied gauche et son pied droit.
« Avance ton pied gauche, gauche, gauche, non gauche, l’autre gauche ! »

Mieux, une jeune et charmante expert comptable de 25 ans, venue avec son compagnon, m’a surpris comme je ne pensais plus pouvoir l’être. Au départ du canyon, les gens enfilent leur combinaison, puis leur baudrier. En général, ils s’en sortent plutôt correctement, je ne les abreuve donc pas d’instructions particulières pour ce faire. Je passe ensuite en revue chaque individu, vérifie le serrage des boucles, effectue les retours manquants, ajuste les cuisses, etc… Eh bien cette jeune femme était la seule parmi la douzaine à avoir enfilé son harnais comme un pull, les bras dans les sangles des jambes ! Tout le monde avait un baudrier à la taille, et elle ne s’est pas posé de question ! Et c’était pourtant une fille brillante ! Je n’ai pas pu réprimer un fou rire, expliquant ensuite à la miss que quand on nous dit que nos clients arriveront toujours à nous présenter une situation inédite, que l’on croyait impossible, eh bien c’est vrai ! Elle en était la preuve vivante…

Un « cheptel » de clients, toujours prêts à tout pour surprendre le jeune (et parfois moins jeune) moniteur…

J comme Jérôme

Basé à Bavella au niveau du Parc Aventures, le « divin chauve » est un camarade hyper attachant. Compagnon du beau Jean Pi, dont le cheveu frisé et les lunettes vissées sur le crâne sont la marque de fabrique, ces deux là font les beaux jours de la Via Ferrata de Bavella. Jérôme a également filé un coup de main au local, à l’inscription des gens en canyon. Son efficacité était redoutable, il remplissait les groupes

comme d’autres des verres à l’apéro. Apéro où il n’était d’ailleurs pas en reste. La compétence de Jérôme, ses qualités humaines en ont fait un bon ambassadeur de Corsica Madness* auprès de la clientèle. Sophie* en a parfois pris ombrage…

K comme Kroast

Vous connaissez les « Krisprolls », ces petits pains grillés Suédois du petit déjeuner ? Ben les « Kroast », c’est les mêmes, sauf qu’ils viennent pas de Suède mais de Casino… Ils ont la faculté de faire pousser les épaules de façon anormale, si l’on en juge la quantité industrielle que le Foué était capable d’ingurgiter !

L comme Lâche !

Il me cherchait un peu depuis le matin. Adepte du mauvais esprit, le dénommé « Boudiasse ». Taquins, lui et sa clique de jeunes Kinés. Sympas les bougres, mais le « Boudiasse » était bougon. Aussi, quand arrive le « rappel* d’initiation », après les deux premiers toboggans de la Purcaraccia, j’ai l’occasion de voir le larron à l’œuvre, corde en main. Un rappel* que je règle volontairement trop court, pour que les gens finissent en tombant dans une petite vasque, sans avoir à manœuvrer leur 8 dans l’eau, ce qui est pénible pour eux et chronophage pour tout le monde. Mais voilà, notre ami refusait de lâcher la corde. Elle ne dépassait du 8 que d’une dizaine de centimètres, de quoi placer une main. L’autre main était « au dessus », ce que je déconseillais à mes clients débutants.


« Lâche la corde, lâche, lâche, lâche ! » lui dis-je d’un ton allant en s’énervant, répétant sans cesse l’instruction de base qui était de lâcher cette p… de corde. Rien n’y faisait, ce grand bonhomme déguingandé faisait remonter la corde centimètre par centimètre, jusqu’à ce que sa main se « fasse bouffer » par le 8. J’ai vu son visage se crisper.

- Lâche bordel, tu vas lâcher oui !


Je perdais ma patience déjà bien maigre… Je réitérais mon injonction, en hurlant cette fois !

Il finit par obtempérer en laissant échapper un petit piaillement, et s’écrasa dans l’eau. Je me mis à hurler de toutes mes forces :

- Quand je dis lâche, tu lâches !

Je ne me serais pas forcément souvenu de ce petit épisode si le Foué*, parti plus tard avec son groupe, et qui se trouvait encore sur la marche d’approche au moment des faits, ne m’en avait fait part. Il a, de l’autre côté du canyon (en rive gauche) et sur un sentier escarpé, parfaitement entendu mon dernier coup de gueule, qu’il m’a cité mot pour mot le soir au souper. Des fois il faudrait que je me calme…


A suivre...

mercredi 25 octobre 2006

LPCMI 2006: G et H comme...

G comme Grimpe

Ce fut bref cet été… Entre l’entraînement à la course à pied, les jours de repos au village, j’ai très peu grimpé. Passons sur la petite séance de bloc à Petreto en compagnie des deux mutants qui adorent cette discipline. Je ne me transcende qu’en falaise, mon arme étant la combativité, pas la force pure… Notons au passage une très belle journée à la Pointe des Sept Lacs fin août, avec Sophie Di Sante dans le rôle du second habituellement dévolu à Viguen. Une magnifique escalade (parfois engagée en dalle) avec les eaux bleus du Capitello en toile de fond. Et un retour alpin, avec assurage en mouvement de la « Brillant Brunette » sur des boucliers granitiques immenses. Un passage un peu technique à la brèche de Sorbo, puis en face Nord, superbe de solitude et de silence. Une descente dans un pierrier austère jusqu’au lac, ses dégradés de bleu incroyables, et la chaleur de l’astre du jour. Cependant, le plus bel instant grimpe restera pour moi, après une tumultueuse et bruyante journée en canyon, le repérage, un soir d’été, à Bavella, d’une mini grande voie pour clients, en compagnie de Mathieu* Blanchard.

Nous vécûmes là un moment exceptionnel de douceur de vivre, de mélange de couleurs, de beauté minérale. Un repérage en solo intégral de la falaise de Margherita, sous les yeux médusés d’une grimpeuse transalpine pendue dans sa corde en moulinette, puis trois longueurs en baskés, anneaux autour du buste, dans une ambiance particulière, indescriptible. Des moments où le bonheur était palpable. Nous étions au cœur d’un site déserté par les touristes à cette heure avancée. Derrière nous, les aiguilles rougissaient au soleil couchant ; en face, le massif des Paliri, où le granite ocre se mêle au vert intense des pins laricci. Au loin, de part et d’autre, à perte de vue, la mer. Un sentiment d’insularité fort, l’impression de faire corps avec l’île, d’être la Corse. Au sommet de la Grande Dalle, un panorama magique s’offrit à nous ; si ce n’était pas le Paradis ça y ressemblait fichtrement. La petite polaire se supportait tout à fait, une légère brise berçait nos visages. Le calme était apaisant. Nous avons posé un rappel* en fil d’araignée, puis nous nous sommes offert un 6b en baskés pour découvrir un autre amarrage plus simple d’accès. Un moment d’amitié aussi, de partage, de discussion. Sans jamais chier dans la bouche de la mère de l’autre, dois-je préciser. Ca change ! Et c’était bien. Relaxés, nous avons, ce soir là, trouvé François énervé voire presque agressif : c’est dire si nous étions en paix !


Sortie du dièdre raide, place à de la dalle sur les pieds à la Pointe des Sept Lacs. L’unique grande voie en Corse cet été…

G comme Guide de Haute Montagne

J’ ai croisé un guide très sympa à la Purcaraccia. Un métier de seigneur, auquel est depuis peu promis notre jeune ami le Jouy, ce qui nous ré-jouit, si je peux me permettre ce médiocre jeu de mots. Mais là n’est pas le propos. Je me fais accoster par un guide de Méribel donc, avec son client. J’en ai moi-même une douzaine. Après avoir discuté le bout de gras avec ce sympathique personnage, je vois qu’ils n’ont pas le matos adapté. Normal, mon interlocuteur m’explique qu’ils sont venus en voyage grimpe, et qu’ils ont profité d’une journée de battement pour s’offrir ce beau canyon. De façon générale, il n’a que des clients avec qui il part en voyage, parfois plusieurs semaines, en expé au Népal par exemple. Le rêve !

Je leur propose, puisqu’ils sont deux, de mettre mes cordes en place et de les en faire bénéficier avant mon groupe, pour qu’on ne les gêne pas. Le guide décline poliment et lance son rappel vert de 8mm dans le vide. Cette corde inadaptée tombe dans une marmite et s’emmêle instantanément. Il en résulte une plâtrée de nouilles absolument inextricable. Il remonte la corde, c’est une pelote géante avec laquelle aimerait sûrement s’amuser un gros chat… Il en a pour l’après midi à défaire les nœuds ! Je réitère mon offre, qu’il accepte cette fois volontiers. Il range sa « boule verte » dans son sac. Mes cordes sont en place en deux petites minutes, habitude oblige. J’en profite pour lui indiquer les deux toboggans du bas, que l’on ne peut pas deviner lorsqu’on découvre le canyon, ce qui est son cas. Bien content de bénéficier des conseils d’un « ouvrier de la Purca », il me remercie chaleureusement.
Je lui promets de faire descendre son client, en échange de quoi je lui demande de bien vouloir contre-assurer du bas le premier de mon groupe. Il accepte volontiers.

« Qui c’est, tu le connais ? » me demandent certains de mes clients.
- Non pas du tout, mais c’est un Guide de Haute Montagne d’une région que je connais bien.

Je vante en quelques mots ce diplôme mythique aux quelques curieux de mon groupe.
Je prends le temps de mettre notre nouvel ami en garde : l’approche du rappel est très glissante, surtout avec ses baskés. Il installe son système de freinage puis, me voyant debout dans la pente en 5-10, me rejoint sans trop se méfier : la sanction fut imparable : zip, vol plané, et retour fracassant sur le flanc droit, pendu à la corde. Le « public » a eu peur pour lui, et j’avoue que ce n’est pas tous les jours que l’on voit un guide s’étaler de tout son long ! Cela n’a par contre pas du tout entamé la bonne humeur de ce montagnard à médaille qui n’avait vraiment pas le ton hautain de certains de ses camarades corporatistes… J’ai promis de passer le voir l’hiver prochain au bureau de Méribel.

H comme Hassan

Authentique homme à tout faire d’Henri, ce garçon est d’une grande gentillesse. Véritable bricole tout, il peut repeindre une pièce, refaire un toit, nous offrir des salades, et même jouer la comédie en feignant de faire rôtir des poulets à Pagliacciu devant des hôtes émerveillés…

H comme Hommage

Le plus beau compliment que l’on m’ait fait cet été émane de François Chopard : je le cite avec le plus de précision possible et vous laisse en juger… la violence !

« La première fois que l’on rencontre Romain et que l’on discute avec lui, normalement, on vomit ».

Je crois que c’est tellement émouvant que cela se passe de commentaires !

H comme Henri

L’homme de Zonza*. A tout juste 50 ans, Henri Santoni est une pile électrique. Personnage multifacettes, charcutier l’hiver, AMM l’été, homme d’affaires 24h/24, Henri brasse sans arrêt, bouillonne d’idées pour développer ses activités, et se dit toujours endetté : « Quand j’ai 10 euros, j’investis 12 ! ». Le mollet dodu, le cheveu rare mais long et frisé, le sourire charmeur, Henri n’est pas loin de posséder la moitié de son village natal. Cela lui vaut sans doute quelques inimités (on est en Corse !) mais aussi le respect de tous. Son tissu relationnel est aussi dense que le réseau des transports en commun à New York et son goût pour le théâtre dans les négociations n’est pas feint. Si nous nous sommes parfois affrontés amicalement pour des histoires de météo, d’orages*, d’annulations ou de reports de sorties, je dois dire que j’ai « accroché » avec le bonhomme. Grand cœur, bon vivant, parfois flambeur (il faut le voir déambuler dans Zonza* au volant de son PT Cruiser cabriolet, un bon vieux Jim Morrisson hurlant dans les hauts parleurs de la stéréo), il m’est apparu réglo en affaires. Henri a également depuis peu goûté aux joies de la paternité... Un homme à qui tout semble réussir !

A suivre...

dimanche 22 octobre 2006

LPCMI 2006: E et F comme...

E comme Echec

Le gros échec de l’été, celui qui me rendra presque malade, c’est l’acte manquée de la « Cullata di u San Petrone », mythique épreuve sur le culmen de la Castagniccia, chez moi. Un truc qui me tient un peu bêtement mais particulièrement à cœur depuis quelques années. 4ème en 2000 en étant le seul coureur à m’insérer dans un classement dominé par une huitaine de légionnaires affûtés venus de Calvi, j’ai remporté l’épreuve, un peu à la surprise générale, en 2004.

Amoureux de ce parcours taillé pour moi avec de la pente et peu de portions « roulantes », j’ai pour habitude d’y donner rendez-vous à mes amis du village, à ma famille, pour que cette souffrance soit un bonheur partagé. J’aime me battre et me faire péter le caisson sous les châtaigniers, j’aime être en forme, me sentir faire mal aux autres concurrents, j’aime le pierrier aride sous le sommet, en plein cagnard. J’aime enfin l’ambiance bon enfant qui règne dans l’aire d’arrivée, les « paghjelle » en fond sonore, les amis du canton venus se divertir, le folklore ambiant, les ateliers de la « Fiera », les animaux, les produits locaux, les beignets que je m’offre après l’effort. J’aime cette foire estivale qui se tient tous les ans le dernier week-end de juillet, au col de Pratu , un haut lieu de mon enfance.


Le L seul au sommet du San Petrone. Deux mois d’entraînement jetés à la poubelle…Même si Jipé pense que « s’entraîner à mort, et finalement, ne pas courir, c’est beau, c’est romantique », je n’ai toujours pas digéré cet accroc dans mes projets…

Battu l’an passé, j’avais toutefois descendu mon chrono de près de 2 minutes et terminé sur le podium. Le niveau était monté d’un cran, avec notamment la présence d’un vainqueur de « l’Interlacs », la course Corse de référence. A la lutte avec mes deux prédécesseurs à la montée, j’étais passé au sommet moins de 45’’ après le futur vainqueur, en 46’35. L’explication allait se poursuivre à la descente. Une chute à pleine vitesse m’avait définitivement empêché de défendre mon « titre ». Je m’étais promis, et je l’avais annoncé au micro après la course, de revenir plus fort en 2006. Et j’ai tenu parole. J’étais prêt. Dès la fin du mois de mai, à Grenoble, je m’entraîne, fais du foncier sur du plat : il s’agit de choper du rythme ! Avant de partir, je monte à la Bastille, un petit chrono pour voir : sans forcer à outre mesure, et surtout sans y croire, je m’approche à 8’’ de mon record. En Corse, je fais deux montées en une semaine au San Petrone, pour repérer. La première avec un sac à dos, la seconde à vide, et je fais le meilleur temps jamais réalisé à l’entraînement. En disposant d’une bonne marge. A Zonza*, après le travail en canyon, je pars courir dans la montagne. Au refuge des Paliri à Bavella, ou sur les sentiers de l’Alta Rocca, notamment ceux de Levie. 44’ au lieu des 3h annoncés pour le quidam, le tout en déroulant, sans jamais être trop mal : la foulée est ample, je prends du plaisir. Je repense aux dires du S quand nous parlions de cette activité ingrate. Je ressens le bien être qui était le sien quand, au top de sa forme, il courait quotidiennement à un rythme infernal, se sentant presque voler… En somme, je me fais une joie d’en découdre dimanche, sur mes terres.

Un changement de programme inédit depuis la création de l’épreuve (qui avait traditionnellement toujours lieu le dimanche du week-end « à cheval » entre juillet et août) et la disparition de mon téléphone* m’ont fait rater ce rendez-vous cher à mon cœur. J’aurais préféré courir et faire 10ème que d’être frustré comme cela. Au final, après la lecture des résultats dans le journal, je prends mon vélo, que je n’ai pas touché depuis un mois et, de rage, me lance dans un contre la montre « test » autour de chez moi : une côte de 5km que je parcours, montre en main depuis l’enfance. J’explose le record de plus de 25’’… un record qui datait de 2005, quelques jours après ma course. De quoi raviver mes regrets…

F comme Frayeur

Un grand moment rétrospectivement, mais une bonne décharge d’adrénaline sur le coup. Saut de 9m à la Vacca*. En charge d’un gros groupe, Mat et moi nous répartissons la besogne. Je gère les descentes sur corde, pendant qu’il s’occupe de faire sauter les plus audacieux. Je dispose, soit d’un rappel* classique dans la fissure dièdre évasée à droite du bloc, soit de l’option plus ludique du trou noir où il faut se glisser, avant de se faire mouliner dans l’obscurité et dans le vide pour atteindre l’eau de ce qu’il convient d’appeler une grotte. De là, les clients se délongent et regagnent la vasque extérieure en nageant, prenant bien garde de ne pas recevoir sur la tête un hurluberlu en plein vol.

Mathieu* fait donc sauter les plus dégourdis pour ce que nous appelons le « gros saut » du canyon. Il est évident que nous n’envoyons personne au 16m, encore moins au 24 ! Comme cela arrive toujours, Mat doit composer avec des gens plus ou moins à l’aise au niveau de la prise d’appel, qui s’avère cruciale. Une boule glissante qui pose problèmes aux sédentaires peu habitués aux activités motrices. Un de ses clients vient de se rater et de partir en glisse… En l’air, il a logiquement pivoté, et s’est écrasé plat dos dans la vasque. Souffle coupé, paniqué, il est secouru par les autres clients déjà en bas. Ils l’escortent jusqu’aux parois bordant ce magnifique bief. Mat gère la « crise » du haut du bloc, s’assurant que le malheureux ne souffre de rien de grave et hurlant des instructions aux « sauveteurs » improvisés : « Mettez le sur le dos, nagez avec lui, emmenez le ! ». De mon côté, j’ai longé un adulte légèrement grassouillet à ma corde de « va et vient » monté sur demi cabestan, et voilà mon gus qui s’engouffre, comme d’autres avant lui, dans le trou noir. Alors que les jambes et la moitié du tronc pendent déjà dans le vide de la grotte, il se coince le haut du bide et se met à hurler. Je le pousse doucement pour qu’il tombe dans le trou comme prévu, rien, il beugle de plus belle :

« Je suis coincé ! Aaaaaaaah ! ». Merde.

- Mat, tu peux venir deux secondes, j’ai besoin d’un petit coup de main…

dis-je d’une voix que je veux le plus calme possible. Son sauteur en herbe semble récupérer doucement, mais on pourrait croire que Mat a pris un coup de vieux lorsqu’il me rejoint. Nous tentons de remonter l’infortuné hexcentrique humain : rien à faire, les trois quarts de son corps sont déjà plein gaz. Il crie à nouveau. Merde ! Pendant que je gère la corde, Mat force son bras gauche à passer dans un trou de souris, alors que l’homme, affolé, halète fortement. Bras gauche le long du corps, non sans efforts, nous le glissons doucement et pop ! il disparaît d’un coup dans le trou comme un suppositoire dans un anus beurré de Mytosil. Entre un saut raté et son évacuation improvisée d’un côté, les cris de terreur de l’ « homme-friend » taille 50 de l’autre, je peux vous assurer que la personne suivante ne mouftait pas à l’approche de l’obstacle…

F comme Flèche

Le but principal. La flèche, la maille, l’oseille, trois termes qui désignent une même chose : la seule en fait qui permet d’accepter d’être tous les jours de sortie avec des débutants parfois complètement hors de forme. Encadrer bénévolement de temps en temps, c’est bien, mais « faire de la flèche », c’est quand même plus motivant !

F comme Foué

Difficile de parler du Foué sans tomber dans la redondance, car tout semble déjà avoir été dit sur l’enfant Meylanais… On sait que l’on peut garer un 38 tonnes à l’ombre de son torse surdéveloppé, on sait que c’est un véritable jukebox à anecdotes*, on sait qu’il est beau, charismatique, qu’il mène la barque du GUCEM depuis de nombreuses années aux frais des ASSEDICS, on sait qu’il vénère le bloc autant qu’il abhorre la montagne… Que dire de plus ?

Que c’est un bon professionnel, un « jeune moniteur », qu’il a le contact agréable avec les client(e)s, qu’il garde son calme et qu’il n’est jamais pressé. Doté d’un bagout naturel cinq étoiles, il a été d’une aide précieuse pour désamorcer quelques conflits internes opposant parfois Mat à Sophie*. Sa présence en revanche lors de conversations musclées avec Henri concernant la météo n’a pas toujours été assurée, comme le lui ont parfois reproché ses deux acolytes, meneurs de la « fronde ».

Excellent cuisinier, il a souvent pris en main les hyper-caloriques repas du soir, ceux qui permettent de tenir le lendemain. Il est vrai qu’un kg de spaghetti bolognaises maison après une bonne soupe de poissons (pêchés par ses soins s’il vous plaît) font plus pour le corps humain qu’un bol de café agrémenté de trois maigres « kroast » et un sachet fraîcheur de gâteaux secs « Gerblé », notre « pain quotidien » habituel.

A suivre...

samedi 21 octobre 2006

LPCMI 2006: C et D comme...

C comme Consignes

Du briefing général aux consignes spécifiques à chaque obstacle, le discours était bien réglé. Du mythique « Vous avez tous, sans exception, des chaussures de merde » au « Attention… ça glisse ! » que les clients reprenaient en cœur en passant par le sobre et classique « C’est beau… on avance !», nous avons pu constater qu’en moyenne, un client sur deux ne prête pas attention aux instructions même les plus élémentaires.

Je me souviens d’un médecin au premier saut de la Vacca* :

« C’est très simple : tu te concentres uniquement sur l’appel, à un pied. Tu pousses sur un pied, pas à pieds joints. Tu es dynamique, tu me fais un saut volontaire, agressif »

- Ok, c’est bon, j’ai bien compris. J’y vais ?

- Quand tu veux…

Et le sympathique bonhomme de venir mourir au ras du bloc après un appel des plus mous, pris à pieds joints…


Votre serviteur donnant les fameuses consignes lors de l’enchaînement des 3 vasques suspendues au canyon de la Purcaraccia.

C comme Corsica Madness

CENSURE PAR LE CSA (Comité de Sauvegarde des Apports en euros)

C comme Craquage(s)

Ils furent nombreux, en privé ou avec des clients. La faute, il faut bien l’avouer, à un Mat Blanchard particulièrement en forme et à un Foué* égal à lui même ce qui veut tout dire. Entre les reprises en cœur et en public des plus grands tubes de Gainsbarre (« Je vais et je viens… » ou pire « Love on the beat »), les amabilités faites à nos mères respectives (CENSORED), la violence a atteint un niveau intolérable pour les gens sains d’esprit.

Heureusement, il y a bien longtemps que nous avons perdu le notre et sommes rodés à ce genre de connerie ; voir la pastille anale d’un Mat accroupi s’approcher dangereusement du visage désolé du Foué*, dérangé en pleine séance d’étirements dorsaux, fut un grand moment dont peu de gens seraient à même de comprendre le sens profond (et c’est tant mieux).

D comme Dégueulasse

Trois mecs qui vivent seuls, à force, forcément, ça devient crade. De plus, tout était prédisposé pour que les choses tournent au carnage : un grenier en guise de salle à manger, pas d’eau courante, trois types dont l’humour douteux a donné la nausée à plusieurs générations d’étudiants grenoblois, une abstinence forcée…

Je garde à l’esprit quelques clichés de notre vie commune : le grenier tout d’abord ; y passer le plus clair de son temps libre n’est pas chose commune dans une habitation « normale ». Amoureusement aménagé par notre « maman » adoptive, François, nous disposions, dans cet espace au plancher poussiéreux et situé directement sous la charpente tuilée, de deux « pièces ». La première comportait une cuisinière, un « micro-zonza », une table en bois assortie de quatre chaises ; le mobilier « Louis XV » de la seconde se composait d’une table basse et de deux vieux fauteuils, au milieu d’un bric à brac de vieilleries appartenant à Henri.

Comme je l’ai dit, l’eau courante n’était pas disponible, ce qui rendait les tâches les plus simples vite pénibles.. Vider son bol le matin, l’eau de cuisson des pâtes, ou faire un brin de vaisselle était donc impossible. Nous avions une bassine remplie d’un jus marronnâtre fait de liquides divers, servant de « tout à l’égout », et passant généralement une petite semaine avant d’être trimballée, pleine à ras bord d’une mixture putride, jusqu’aux toilettes de notre modeste logis pour être enfin vidée.

Autre moment fort de l’été, la dégustation de l’eau de la Purcaraccia, enrichie aux oligo-excréments. Cela mérite le détour, nous y reviendrons plus longuement**.

De façon quotidienne, les petits gestes, les banalités versaient aussi parfois dans le cradoc. Jugez plutôt : Un mince rideau de tissu séparait notre modeste salle de bains de la chambre royale du Foué*. Salle de bain comprenant évidemment le chiotte, exiguïté oblige. Il n’était pas rare, le matin, de se laver les dents à moins d’un mètre d’un collègue déféquant lourdement, lâchant par instants un petit râle de plaisir alors qu’un étron gigantesque et odorant venait de quitter la rade anale pour prendre le large… J’ai même souvenir, puisque vous semblez en vouloir encore, de mes collègues me demandant de faire couler l’eau du lavabo tant la diarrhée violente dont j’étais victime suite à l’ingestion d’eau de torrent** représentait non seulement une puanteur sans nom, mais aussi une nuisance sonore intolérable…

A suivre...

** Voir "V comme Vomir"

jeudi 19 octobre 2006

LPCMI 2006: A et B comme...

A comme Anecdote(s)

Difficile d’y couper quand on passe ses journées d’été en compagnie de plus de 300 clients d’horizons différents, et ses soirées auprès de l’intarissable Foué* Chopard plus connu sous le nom de « Machine à anecdotes ». Elles ont été nombreuses et je promets de vous en livrer les plus belles dans la suite de ces lignes.


Foué, l’homme aux milles anecdotes, ne se sépare que rarement de son sourire charmeur. Dans sa couchette, Mat Blanchard, regard angélique, cache bien son jeu…

A comme Alta Rock Café

La propriété d’Henri, comme tant de choses à Zonza*. Cet été, il en a confié la gestion à Caro. Idéalement placé au cœur du village, l’Alta Rock ne semblait pas rencontrer le succès escompté au début de la saison. Petit à petit, le public ne s’y est pas trompé et s’est pressé d’aller déguster les « Golgoth-glaces » et autres « monstre » milk shakes maison. Il faut dire que la personnalité de Caroline déroute un peu au premier abord. Cette grande et pulpeuse brune, marin de son état, gagne à être connue.

Au début, les relations étaient tout juste cordiales avec Caro. Il était clair qu’on préférait amener les clients à la crêperie où l’accueil semblait plus chaleureux. Pour ne rien arranger, en faisant une vaisselle derrière le comptoir du bar de l’Alta Rock, après avoir obtenu une autorisation réticente de Caroline, j’avais complètement bouché le lavabo dépourvu de siphon ! C’est à coups de Destop et grâce à la patience du Foué* que nous avons fini par déboucher le merdier. Et Caro s’est détendue, pour ensuite carrément se lâcher (du moins verbalement) lors de fins de soirées animées avec Mathieu* et moi…

A comme Arrosé(s)

C’est le propre du canyon ; une bonne partie de son « sel » : les rappels arrosés. A la Purcaraccia, magnifique itinéraire idéal pour travailler, il y en a un grand de 45m. Une goulotte de granite peu raide sur le haut, et très glissante dans la partie médiane. Quasiment tous les clients s’y vautrent et se retrouvent sur le ventre, le dos, ou à genoux. La routine quoi. Le premier client est contre-assuré du haut, il « tient » ensuite les cordes pour les suivants. Rassurant mais pas hyper utile, étant donné que l’on fait souvent descendre les clients avec un « vertaco » qui freinerait même un tank. Pour ma toute première journée seul avec mon groupe, un dénommé « Gilou » se met une bonne ratasse et se retrouve à l’équerre, allongé dans la goulotte. Il a bien évidemment lâché la corde, au mépris de la consigne* la plus importante, et tente vainement de se relever. Je lui hurle de continuer à descendre, même dans cette position inconfortable : quelques mètres plus bas, un replat lui permettra de reprendre une posture plus orthodoxe. Il n’entend rien, assourdi par la cascade et affolé par le débit d’eau qu’il parvient (il faut le faire à cet endroit là, qui ne mouille normalement que les pieds) à se prendre en pleine face. Le « contre-assureur », investi dans sa mission, lui aussi paniqué par cette situation qui deviendra très vite banale, se pend dans la corde de Gilles, l’empêchant fatalement de bouger d’un pouce... J’en suis quitte pour rejoindre ma « victime » via l’autre corde, libérée par un client plus adroit (heureusement, je n’avais aucune envie de descendre sur corde tendue), remettre le « naufragé » dans le bon sens, hurler sur le type du bas pour qu’il donne du mou, et remonter 20m au basic… Vu la chaleur étouffante qu’il faisait ce jour là, et ma combinaison 5mm (je n’avais pas encore récupéré de « shorty »), je suis arrivé en haut passablement déshydraté et en hyperthermie !

Le premier grand rappel de la Purcaraccia, où 9 clients sur 10 goûtent aux joies de la zipette…


B comme Béa

Trois générations à la crêperie : Béa, sa mère, et son fils. J’ai passé de nombreux après-midi, attablé sous la protection des parasols, à déguster crêpes au chocolat avec boule de glace ou autres crêpes nutella offertes par des clients au retour de canyon. Des moments de débriefing sympas, où le sentiment d’avoir bien travaillé se mêle harmonieusement à la fraîcheur piquante de l’Orezza dans la gorge, au décolleté d’une jeune cliente épanouie, et à la vue magnifique sur l’Alta Rocca.

B comme Boulets

Le terme politiquement correct serait « clients ». Bon, j’exagère c’est vrai, mais l’une des expériences les plus marquantes de l’été a été pour moi la découverte du handicap physique certain de l’être humain moyen. En clair, le vacancier, sédentaire dans l’immense majorité des cas, éprouve des difficultés motrices. Pire, il peine même à se déplacer sur un sentier, un simple sentier. Quant aux habitués des bureaux et des emplois à fort stress, accros à la cigarette, ils toussent, crachent, soufflent et halètent, rougis par l’effort à la moindre déclivité. De mon côté, je respire calmement par le nez en m’efforçant de ne pas faire éclater ce peloton poussif…

Si certains clients se montrent à l’écoute des consignes*, finissent par prendre leurs marques et à évoluer correctement, d’autres sont de véritables croix et nous font parfois vieillir de 10 ans**. J’ai le souvenir marquant d’une journée à la Vacca* avec Mat où nous avons cumulé de sérieux « cas ». Lors du premier saut, nous proposons deux options : un saut à 2m, un autre à 4. Il m’est arrivé de faire sauter tout le monde à 4m du premier coup, mais là, à deux moniteurs, le choix s’offre aux canyoneurs. Surprise, le cheptel se répartit équitablement sur les deux ateliers. Premier à sauter sur le petit bloc, dont je me charge, un jeune homme. La petite trentaine probablement, petite barbe de trois jours, un peu « effemminé ». Il refuse l’obstacle, chouinant tel un pré-ado : « C’est horrible, c’est trop haut, je n’y arriverai jamais ! ».

Etant donné qu’on se trouve là devant le « jump » le plus bénin du canyon, on comprend que ça part fort. Je décide d’en faire sauter devant lui, et voilà que les deux suivants refusent d’être les premiers ! Ce petit monde commence déjà à m’énerver, il n’est pas 10h30, la journée va être longue ! Il a fallu que je pousse ce poltron pour qu’il atteigne enfin la première vasque, dans un petit cri. Bien sûr, au saut de 9m, il a été mouliné. Arrive le « soboggan » ou « toboggojump », bref le magnifique rideau d’eau à négocier assis ou tête en avant pour les plus aguerris. Revoilà mon courageux client freinant des quatre fers, couinant quand j’accompagne son avancée, une main dans son dos. Mathieu* est déjà en bas dans la vasque, à admirer les paysage en compagnie de la vingtaine d’autres clients. Je sens le sang monter et je m’énerve :

« Si tu n’y vas pas, je vais encore être obligé de te pousser ! »
- Mais ce sera pire ! pleurnicha-t-il.
- Ok.

Et moi de me placer derrière lui, de caler un pied sur ses fesses, jambe fléchie. Je l’ai éjecté d’un mouvement d’extension de la guibole en force max. Poussant un autre petit cri, il a disparu dans le vide. Quelques secondes plus tard, il nageait paisiblement dans la superbe vasque, me faisant un signe du pouce pour m’informer que tout allait bien… Comme quoi, certains ont vraiment besoin qu’on leur botte le train, au sens propre !

A suivre...
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** voir "F comme Frayeurs"

mercredi 18 octobre 2006

Le Petit Corsica Madness Illustré: c'est parti pour la superproduction de l'été !

Latest news of the forehead... ou les dernières nouvelles du front !

Comme tout bon journaliste, j'avais préparé en amont du challenge 4S une loghorée vantant les mérites de celui qui ne pouvait que s'imposer en 2006, l'incontournable B. Un gros mois plus tard, où en sommes nous ? Forfait à cause de son grave accident, le B est en rééducation à St Hilaire, remarquablement entouré, notamment (et c'est une exclusivité Lansb Mag) par une charmante kinésithérapeute, dont nous publierons probablement l'entretien exclusif sous peu.

Les épreuves des 4S se sont donc déroulées sans l'un de ses plus charismatiques compétiteurs. Le challenge a vu la victoire du régulier Nicolas Montigaud devant votre serviteur, parvenu se hisser de la 4ème place du général à la seconde lors de l'épreuve de CAP, qu'il a pourtant ratée.


Le L lors de son triple hommage à l'épreuve de vélo de route: on le voit ici vénérer l'esprit de la polaire rouge du B, vêtu de la tenue Carrera chère à Marco Pantani en 95, et arborant un brassard noir en hommage à l'ami Caster, qui "allait mourir" lors de ce chrono. Au final cette séance cul-tuelle a porté ses fruits, le L améliorant son record de 55" sur cet infâme exercice et montant sur la 3ème marche du podium derrière la fusée Rajat et la mobylette Jipé.

Jipé, dominateur sur deux roues au général en l'absence sur les trois épreuves de quelques monstres sacrés (Rajat, Chorier), s'est retrouvé bouté sur la plus petite marche du podium suite à une prestation quasi incompréhensible en CAP vu le rythme cardiaque hallucinant qu'il est capable de maintenir... L'ironman Xavier Delore s'est quant à lui emparé de la 4ème place, une épreuve de CAP en demi-teinte le privant du podium final sur lequel il était pourtant installé. On notera les démonstrations de force de l'incontournable Rajat, du talentueux Julien Chorier, et du filiforme mais terriblement efficace Greg Druais lors de quelques apparitions en "guest stars". Un grand bravo à tous les participants, que le 4S spirit soit avec vous jusqu'à l'édition 2007 de ce monument du sport Grenoblois !

En attendant, "con promis, chose due" comme dirait l'autre, voici la diffusion exclusive de la superproduction estivale: "Le Petit Corsica Madness Illustré édition 2006". Trente pages de conneries sous le soleil Corse, pour faire passer les longues journées pluvieuses d'automne au boulot. Soyez fidèles, et régalez vous !

LPCMI 2006: Introduction

2006 : l’année du changement. Le passage redouté de la barre fatidique des 30 ans bien sûr, mais aussi le grand chambardement professionnel : des relations de plus en plus tendues au travail, une incompatibilité chronique avec J.E., le chefaillon le plus incompétent du grand Sud Est, et l’irrépressible envie de prendre l’air, de voler de mes propres ailes me font enfin franchir le pas. C’est décidé, je me lance. Passons sur le bras de fer Xerox/Lansb qui m’a gâché mon printemps et causé du souci avant mon départ pour l’UF6.

Ce dernier stage de formation, pourtant correctement préparé, ne s’est pas toujours déroulé sous les meilleurs auspices. En effet, avec une petite vingtaine de canyons réalisés en un gros mois, dont une dizaine sous la tutelle du terroriste Tessanne qui finira même par m’uriner au visage**, ce qui fait de lui la personne avec laquelle j’ai été le plus intime de toute mon existence, j’avais mis toutes les chances de mon côté. Grande gueule notoire et homme inflexible sur quelques principes (parfois discutables j’en conviens), je ne tarde pas à me mettre à dos, au cours d’une journée de merde, un encadrant non moins haut en couleurs, D. S.

Une journée noire où je pars seul en bagnole du sordide « Château de la Causega », suis la mauvaise camionnette en rêvassant au son d’une chanson insipide à la radio italienne, et finis par me retrouver isolé, sans téléphone* portable ni carte ni topo, à la recherche du canyon de la Ceva. Un peu d’intuition, de flair, de mémoire, et de millimètres de gomme me permettront de limiter la casse à trois quarts d’heure de retard seulement. Mais il était écrit que ce jour serait maudit et la suite ne s’améliora pas, avec en point d’orgue une discussion houleuse sur l’homogénéité des enseignements prodigués lors du stage. Cela explique probablement ma note de stage tout juste passable (10) alors que dans l’ensemble, il me semble, toute forfanterie mise à part, avoir mérité bien plus au regard de mes prestations et comparativement à celles de certains de mes collègues. L’exam technique sera en revanche une belle réussite, ce qui me permet d’empocher cette fameuse UF Canyon, que sept stagiaires* tout de même se verront refuser. La suite de mon projet peut donc voir le jour.

Je pars en Corse le 7 juillet après m’être offert un beau baudard Petzl ainsi qu’une paire de 5-10 Canyoneer flambant neuves. Passer sa vie dans l’eau avec du matos approximatif ne me semble pas être une solution, et à l’heure du bilan je me félicite de ce choix. Je décide arbitrairement de débuter ma saison professionnelle le 15. Cela me laisse le temps de m’installer au village, de profiter de la plage, de récupérer ma grand-mère presque nonagénère et tout juste sortie du bloc opératoire, parée pour une nouvelle décennie d’aventures d’insulaires !

J’ai pris le parti de découper ces deux mois en un abécédaire original, calquant ainsi mon œuvre sur celle de François Marcantoni, ex-truand truculent auteur d’un livre savoureux sorti récemment sur « le milieu » des années 60-70. Monsieur François, le milieu et moi de A à Z. Un ouvrage que j’ai dévoré et que je recommande vivement aux nostalgiques d’une époque où l’honneur et la parole donnée n’étaient pas de vains mots. Surtout chez les bandits. Tout ça pour ajouter qu’au cours de notre voyage littéraire (vu la longueur on peut même parler d’odyssée !), les mots suivis d’une astérisque (*) font l’objet d’une rubrique dans l’abécédaire, on pourra donc s’y reporter. Une bonne idée empruntée à l’ami Marcantoni encore une fois…



** Aussi horrible qu’authentique… Nous pissions côte à côte quand le malotru, observant jalousement la différence d’échelle entre nos deux engins, visa haut avec son petit tuyau. Je me jetais, combinaison débraillée, directement dans la vasque terminale de l’Imberguet pour rincer l’ignoble liquide tiède. L’eau gelée me saisit immédiatement mais je promis de me venger. Et je le ferai, tremble Manu !