dimanche 26 novembre 2006

Lansb Mag Classic: un document d'archives exceptionnel !

Un dicton populaire bien connu clame que la valeur n'attend pas le nombre des années. On pourrait ajouter que la connerie non plus. Et nous le prouvons ! Aujourd'hui, spécialement pour toi, ami lecteur, une équipe de "conneristoriens" a déniché une perle: des révélations fracassantes sur le passé du plus malicieusement imbécile des magnats de la presse, votre prétentieux serviteur. Oui, au passage, je ne supporte plus les "humbles serviteurs", sus à la fausse modestie.

A l'époque de ses légendaires études d'ingénieur donc, votre imbu-de-sa-personne serviteur dirigeait une non-association ayant défrayé la chronique sur le campus, le "Club Misère". Prenant à contre pied le courant associativo-bénévolo-estudiantin, celui qui allait devenir le L avait réussi à propulser cette connerie-hommage à Coluche jusque dans la presse nationale !

En effet, L'Express n°2490 du 25 au 31 mars 1999 publiait un article sur ce fameux (et défunt) Club Misère. Nous avons retrouvé ce précieux document et ce n'est pas sans une certaine délectation que nous vous l'offrons aujourd'hui comme une tribune sur un passé de jeunesse insouciante, sur un état d'esprit peut-être pas si has-been que cela...

A titre anecdotique, l'histoire d'amitié entre le L et le M naquit progressivement suite à un mail général (à l'attention de l'école entière) sobre mais sans équivoque du futur "M": "J'encule Lambert et le Club Misère". Bigre bigre...






mardi 21 novembre 2006

32 ans de Manu Tessanne: son fan club témoigne...

Un cliché rare: Manu Tessanne dans un état presque normal. Ce garçon demeure un mystère et le fantasme de tous les psychologues...

32 bougies déjà pour l'immensément populaire Emmanuel "Man" Tessanne. Le plus célèbre et à la fois inélégant des moniteurs d'escalade de la vallée du Grésivaudan reçoit, pour l'occasion et via son fan club officiel, de nombreux témoignages d'amitié (ou pas) venus de la région toute entière...

Voici en exclusivité pour Lansb Mag un véritable « pot pourri » du « Courrier des lecteurs » de son fan club: le TTTTTTTTTTFC (Tapette Tarlouze 'Tain T'es Trop Top on T'adore Tous pour Toujours Tessanne Fan Club)

De la part…

… d’une ancienne étudiante ayant effectué un très court passage au Gucem:

Espèce de salaud,

Au fond t'avais raison, j'étais mignonne mais la moustache ne m'allait pas. Je ne te remercierai jamais assez de me l'avoir fait remarquer en public... Après une épilation au laser et deux ans de thérapie pour surmonter les troubles mentaux que ta rencontre a provoqués, j'ai enfin pu réaliser mon rêve. Tu n'es qu'un gougnafier mais finalement tu m'as ouvert les yeux. On va dire qu'on est quitte.

A jamais,

Titia, mannequin à l'agence Elite.

… d’un client:

Cher Monsieur Tessanne,

Je vous remercie pour la belle journée de plein air vécue à vos côtés. Je ne regrette absolument pas les 50€ de participation aux frais pédagogiques et matériels. En revanche, je suis consterné de voir l'usage que vous faites de cet argent dûment gagné dans d'obscures soirées Chartrousines. Je ne vous en félicite pas.

David Sayatham.

… d'un ami spéléologue :

Yo Man,

Ce mot tient lieu de cadeau: c'est un « bon » pour une nuit toutes options avec Maud Simonet-B. Tu verras c'est de la bombe ! Joyeux anniversaire !

Pascal G.

… d’un admirateur anonyme:

Bonjour Emmanuel,

A Orpierre, j'ai déposé, avec un peu d'avance, un présent sur le toit de ton Vito. Comme tu as pu le voir, c'est un cadeau qui venait des tripes ! Ne me remercie pas, les amis sont là pour ça,

Pour la suite, je te dis « merde ! »,

Mathieu C.

… d’un ami de 30 ans:

Salut Manuel,

Nous nous sommes toujours connus et avons tout partagé en deux: tu as eu le mental et j'ai eu la force. Bon, c'est vrai, tu as aussi eu la force. Tu as eu Charlotte et j'ai eu la liberté. Disons plutôt que tu m'as pris Charlotte et que du coup j'ai été libre. Tu travailles avec des amis sympas et j'ai du supporter le Lansb et le Blanchard tout l'été. Mais je sens que la chance tourne enfin: en effet, j'ai toujours plein de cheveux et ta calvitie progresse au grand galop: tu finiras avec une casquette en peau de fesses !

Je te déteste, passe un anniversaire pourri !

ton employeur et ami d'enfance, le Foué.

Un message qui vient du Ciel:

Au nom de Moi, du Fils, et du Saint Esprit, Amen !

Bon anniversaire mon fils. Je suis encore une fois désolé d'avoir raté la conception de tes attributs génitaux. J'étais un peu distrait et j'ai utilisé le même moule que pour ceux de Michel Petrucciani. Je constate avec plaisir que tu fais malgré tout un usage honorable de ton ersatz de pénis. Embrasse Chloé et Camille pour moi, et dis à Romain qu'il pourrait passer manger à la maison voir son vieux père de temps en temps.

Dieu.

… de Gabriel F.


Joyeux anniversaire Manu ! J'aurais aimé te voir plus souvent ces temps-ci mais ma copine fait sa première dent et du coup elle dort mal et pleure beaucoup. Comme on est réveillés toute la nuit j'ai dû inventer des jeux pour passer le temps au lit, je t'expliquerai...
Bien à toi,

ton Falcounet.

… de la DRJS Rhône Alpes

Monsieur,

Nous apprenons suite à de longues recherches que vous avez été le conseiller de stage d'un candidat qui vient de brillamment réussir l'examen final du BE Escalade. Devant les performances stratosphériques réalisées par votre protégé lors de ces épreuves, nous souhaitions vous adresser nos sincères félicitations pour le travail de coaching et de formation que vous avez effectué sur ce personnage d'apparence ingrate. Sachez en outre que les portes du MJS vous sont ouvertes et que vous nous honoreriez d'accepter un poste de consultant. Votre prix sera celui du contribuable.

Veuillez agréer, bla bla bla,

… du Président de ton fan club...:

Salut mon Man’,

Cher et grand ami, pour ton anniversaire et compte tenu de tes compétences avérées en matière d'enfants, je suis prêt à partager avec toi ce que j'ai de plus cher au monde... Accepterais-tu la garde alternée du Jouy ?

Très amicalement tien, ton ami le L.

lundi 20 novembre 2006

Nouvelle formule !

"Lansb Mag écrit tout haut ce que les autres n'osent pas penser tout bas."

Tel est le nouveau slogan du #1 de la presse montagno-people iséroise. Un an presque et demi d'une existence cahotique n'ont pas eu raison du nouveau né, même s'il présentait des malformations a priori fatales. Les esprits malades et fébriles qui sont responsables du flot quasi ininterrompu de connerie sur ce canal en ont enfin terminé avec la grande saga de l'été.

Ce timing semble être parfait car la belle saison vient justement de s'achever ce week-end, le mercure ayant finalement accepté de passer sous la barre des 20°C... L'hiver arrivant donc (enfin ?), il va être grand temps de "faire du gras" telles les marmottes afin de se mettre à l'abri de la morsure du froid. Et pour être gras, LM ne craint personne, pas même Jabba the Hut ou son jumeau Guy Carlier...

C'est donc avec une certaine émotion que nous vous présentons, dans ce nouvel écrin, la collection "Connerie Automne-Hiver 2006/2007". Nous espérons que notre lectorat en expansion exponentielle (à moins que ce ne soit logarithmique, mes souvenirs sont vagues) saura apprécier ces quelques kilogrammes de gras dans un monde de finesse...

mercredi 15 novembre 2006

LPCMI 2006: U, V, W, X,, Y, Z comme... Z'est fini !

U comme U mo paese

J’y tiens à mon village. Mes racines sont là, mes plus beaux souvenirs d’enfance aussi. Pour lui, pour ma grand-mère, pour Elsa, je suis encore capable de faire des « folies » comme à 20 piges. La fête de l’église, rassemblement incontournable ces dernières années, a été le théâtre d’une de ces « conneries » qui défoncent la santé, mais qu’on referait pareil si c’était à refaire. Le 11 août, après avoir encadré en canyon toute la journée, j’ai ramené les clients à Zonza, rangé le matos avec eux, m’excusant de ne pas aller boire un coup (une fois n’est pas coutume).

En voituuuure ! C’est un combat de rue toutes options, dépassements 4 étoiles (euh, 4 points plutôt) sur la descente de Bavella, franchissement du mur du son à Vix, traversée « sportive » de Ghisonaccia, remontée à bloc au village par Chiatra. Je regrette que ma mère n’ait pas été dans l’auto, elle aurait apprécié ces… 115km de routes Corses. Ceux qui les connaissent savent qu’il vaut parfois mieux faire le triple sur autoroute ! Douche, petit « en cas » avec Tonia, et ensuite, fête sur la place. Enfin attablés, on mange, on trinque, on discute, on rigole. C’est une des rares occasions de voir l’ensemble de la population établie et des estivants réunie. Ne la ratons pas. La plupart des anciens sont là, plus ou moins en forme. Je prends quelques clichés, pas folichons aujourd’hui mais qui prendront une autre perspective quand ces mémoires vivantes des temps passés se seront éteintes…

Je me couche vers une heure du matin, sans excès. A six heures et quart, après un bref petit déjeuner, je reprends la route, quittant un Petricaghju à peine endormi. A huit heures moins le quart, au terme d’un voyage à Mach 12, je gare la caisse fumante devant Corsica Madness*. Les premiers clients vont arriver, je suis déjà épuisé. Il faut pourtant partir en montagne et gérer une nouvelle journée de travail… Finalement, être logé à Zonza, ce n’est pas si mal !

Petricaghju, havre de paix.

V comme Vacca

Un magnifique canyon encaissé, aux biefs magnifiques et aux sauts amusants. Un saut de 24m que le destin m’a empêché de faire le jour de mon départ. Aurais-je sauté ? Peut-être pas. Si oui, m’en serais-je tiré indemne ? Peut-être pas non plus… Ca me fera un bel objectif pour 2007 !

V comme Vomir

Boire l’eau des rivières, faire fondre de la neige pour s’hydrater, ce n’est pas la première fois que je le fais. Ca fait des années que donne priorité à ma soif du moment par rapport à d’éventuels problèmes gastriques inhérents à cette prise de risques. Mon opinion va peut-être changer. Rappel des faits : Romain perd sa bouteille en canyon, celle de Mathieu* se vide malencontreusement. Mat fait le plein d’eau de la Purcaraccia et donne à boire au Lansb, avant d’engloutir le reste de la flotte maudite.

Quelques heures après, Mat est malade comme un chien. Il a même appelé le 112 pour obtenir le numéro du médecin de garde, car nous n’étions pas présents dans la chambre ! La nuit venue, Foué* parti en repos avec ses parents, je profite du grand lit. Ainsi, pensais-je, je ne risque pas d’être malade à mon tour et de compromettre mes chances dans la course du San Petrone. Je n’aurais pas besoin de ça …. Mat dort dans l’autre chambre. Je suis réveillé en pleine nuit par un bruit de gargouillement atroce. Quelqu’un agonise. Je me frotte les yeux, m’appuie sur les coudes dans le lit. Mathieu* vient de vomir* sur la moquette de sa chambre. Dans l’obscurité, je vois le malheureux bondir vers les toilettes, dans un élan désespéré. Trop tard. Arrivé au pied de mon lit, il s’arrête net, casse le buste en deux, tête entre les jambes. Bloooah ! Il vient de récidiver. Mat finit sa course dans la salle de bain, pour s’essuyer le visage, et passera un long moment assis sur le carrelage, déconfit. Les malheurs du haut-savoyard ne s’arrêtèrent pas là : le lendemain, entre diarrhée et vomissements, il est totalement déshydraté et en hypoglycémie. Lors d’un court passage au Zampo entre deux accès de fièvre, pour prendre l’air (à 20 mètres de la maison), il s’effondrera, faisant souffler un vent de panique dans l’artère principale du village quand les pompiers interviendront !

Ces péripéties vaudront à Mat, le temps de quelques heures, le surnom* de « Vomito ». J’aurais mieux fait de ne pas me moquer. Les effets de la Purcaraccia ont mis 48h pour me démonter la tronche, mais j’y ai eu droit aussi. De retour du village où je me remettais de ma course manquée, le dimanche soir, j’ai la sensation inédite d’avoir envie de vomir* en conduisant. Bizarre, ça ne m’étais jamais arrivé. Je débarque à Zonza* à 23h30 et ne demande pas mon reste : au dodo ! Il va me falloir des forces car je suis revenu exprès pour palier à la maladie de Mat. Deux heures plus tard, j’ai une boule de métal dans le bide : que ça fait mal ! Je me tords de douleur dans mon duvet, et demande à Mat des médocs. Rien n’y fera : une heure après, je fonce aux toilettes et rends l’intégralité de la tarte aux herbes de ma grand-mère, secoué par plusieurs spasmes violents. Sophie*, que mes compères viennent de récupérer à l’aéroport d’Ajaccio, et qui dort par terre, est ravie de cet accueil princier. Je passe une grosse demi heure avachi sur la cuvette, ne sachant pas quelle sortie choisira le liquide indésirable pour s’échapper de mon corps tremblottant…

Le lendemain, je suis complètement épuisé, d’une faiblesse… « Blanchardesque ». Alité jusqu’en fin de journée, alternant poussées de fièvre et chiasse mexicaine, c’est finalement… Mathieu* qui prendra mon groupe en charge et me remplacera ! Je lui avais rendu un service identique samedi…Un partout, la balle au centre. Mais c’est terminé : on ne nous reprendra plus à ingérer la flotte de ces rivières ! Le bruit courait, à Bavella, qu’un cadavre de mouflon avait été vu en amont du canyon… probablement une victime des crûes orageuses des jours précédents… L’orage* venait, indirectement, de faire deux victimes de plus.

Z comme Zonza

Le village clé de l’Alta Rocca. Au pied des aiguilles, ce village très touristique sait garder une âme. Il a de la gueule, il est situé dans une des plus belles forêts Corses, l’Ospedale. J’ai aimé mon séjour là bas. Ce n’est pas le même attachement qu’à mes racines familiales de Castagniccia, mais j’ai envie d’y retourner. La saison « touristique » y est acceptable, même agréable, ce n’est pas Saint Tropez, ni même Porto Vecchio. Et il y a tant à grimper…





LPCMI 2006: S et T comme...

S comme Sophie

Connaissance de Mat Blanchard et du Foué* Chopard, cette grenobloise est venue en renfort pour s’occuper du secrétariat de « l’association », et ce dès la fin juillet. Sympa et mignonnette au premier abord, j’ai eu la délicatesse de l’accueillir, malade comme un chien en vomissant bruyamment à quelques décimètres de son duvet . Pourtant, en gentleman, j’ai eu l’obligeance de déposer ma tarte aux herbes à peine attaquée par les sucs gastriques dans la cuvette. Grand seigneur. Au fil des jours cependant, la miss a montré quelques limites. Sa présentation des canyons, véritable institution, était aussi invariable qu’une règle de grammaire :

« Entrez, il y a des photos. Sur votre droite, le canyon de la Purcaraccia, un canyon très ludique, avec des toboggans et deux grands rappels* », débitait elle sur un ton monocorde.

- Sur votre gauche, la Vacca*, un canyon essentiellement de sauts.

- Mais certaines personnes intelligentes le font aussi !

s’exclamait un Foué* soudainement apparu à la devanture du local. Les clients s’esclaffent. Sophie pas.

- Elle n’a pas encore saisi ma blague !

renchérissait la « machine à anecdotes* », sourire aux lèvres, les épaules situées à 80cm de part et d’autre de son cou. Et le voilà de rebondir dans une description « adaptée » des possibilités des canyons proposés, vantant en priorité les mérites de celui pour lequel il restait de la place le lendemain, usant de son charme pour séduire les dames, de son humour pour inscrire les messieurs, etc…

C’est parfois ce type d’attitude « vendeuse » qui a manqué à Sophie M., par ailleurs très gentille et serviable (merci pour la vaisselle !). Je n’irai pas, comme l’ultraviolente « Blanchardisation », la classer définitivement dans la catégorie « des gens que je considère comme inutiles » ! Quoique… Son copain (à Sophie, suivez !), prénommé Mathieu* lui aussi (décidément), avait la fougue de ses jeunes années. Avec tout juste deux décennies au compteur, il a tenu quelques propos illogiques (« La moto est bien plus physique que l’escalade ») que son jeune âge nous a aidés à pardonner avec la condescendance, de nos yeux d’adultes. Il est vrai que ses déclarations tonitruantes étaient difficilement défendables, lui, le motard au physique de crevette, comparé à celui d’un grimpeur de bloc pur jus, le Foué*. L’une de ses interventions les plus marrantes a eu lieu au « Randonneur », où nous avions nos habitudes. Il s’agit d’une petite pizzeria Corse ayant pignon sur rue à Zonza*, avec un patron costaud et impressionnant, roulant soit dit en passant dans une magnifique Audi RS4. L’ami Mathieu*, originaire de la bourgeoise ville de Senlis, s’en est allé demander un « café gourmand ». Devant l’incompréhension de la serveuse (Anglaise !), il a éclairci son propos en parlant d’un « café assorti de petites mignardises ». Tronche ahurie de la demoiselle, encore plus perdue ! On avait du mal à ne pas éclater de rire !

S comme Stagiaire

CENSURE PAR LE CSA (Comité de Sauvegarde des Apports en euros)

S comme Surnoms

Nous nous en sommes affublés. Rien de surprenant, je m’en suis déjà, vous le savez, attribué plus d’une dizaine au cours de ma vie. « Le Véra de la Castagniccia » a cette fois été choisi pour moi, par Foué*. Quant Mat a demandé pourquoi un véra, Foué* a été tranchant :

« Ben si, Romain c’est quand même un gros porc ! »

J’ai été touché. La sagesse, le calme, le rôle de « juge de paix » plaisant bien à l’armoire à glace Chartrousine, il se vit coller l’étiquette de « Vache placide de Bavella ». Quant au bambin binoclard, légende vivante du dortoir filles des résidences universitaires, son habileté, sa soif d’indépendance, son aisance firent de lui « le Cabri de l’Alta Rocca ».



Le « cabri de l’Alta Rocca » prend son envol devant un parterre (ou un par-mer ?) de clients ébahis !


La « vache placide de Bavella » n’est jamais à court de bons mots. Et toujours cette largeur d’épaules unique sur le continent Eurasien…


S comme Sniper

Des clients, nous en avons vu des centaines. Le plus original, en ce qui me concerne, était un jeune ancien combattant, euh à moins que ce ne soit un ancien jeune combattant ? A 24 ans, il était « sniper » dans l’armée, tireur de précision. Il pouvait dégommer à +800m ! Il manquait un doigt à ce garçon, arraché par une balle de paysan en Côte d’Ivoire. Il avait également été victime d’une balle dans la tête. Un type simple, discret sympa, ayant aussi bourlingué au Kossovo et dans d’autres contrées dangereuses, mais qui avait malgré tout un peu peur en rappel* ! Peut-être avais-je eu tort de lui affirmer qu’il ne risquait rien, une situation nouvelle pour lui…

Autre personnage haut en couleur, Valery. Un type du Sud, vendant des hélicoptères ! Pas banal ! Ses gosses étaient sportifs et sympas, j’ai bien accroché avec cette petite famille qui a fait plusieurs canyons en notre compagnie.

Je me souviens également de deux beaux mâles, la trentaine bien entamée, propres sur eux, bronzés, poilus, le cheveu coupé et coiffé, la belle Audi A3. Convaincu qu’ils vivaient ensemble, j’ai ai eu la confirMation quand, à la fin de la journée, ils m’ont dit : « tu sais, on a du mal à avoir des enfants ! » en éclatant de rire. Ils étaient beaux et vraiment sympas. Ca vaut parfois mieux qu’une troupeau de gonzesse au physique répugnant. Un excellent souvenir que ce couple pas comme les autres.

Bon souvenir de Gilles et Hélène, un ex gendarme et une motarde, la cinquantaine tous les deux. Sympas, sportifs, et ouverts. De quoi vous faire aimer les képis, un comble ! Il fallait rien que pour cela les mentionner.

Enfin, et sans bien sûr être exhaustif, je tiens à mentionner le trio Jérôme, Angélique, et Isabelle. Sympas ces trois là. Jérôme a été l’auteur d’une remarque mythique à l’attention d’un touriste qui me demandait, comme tant d’autres avant lui, si « ça saute là ? ». Comme d’habitude, ne voulant prendre aucune responsabilité vis à vis de gens qui ne sont pas de mon groupe, j’ai esquivé la remarque, ignorant mon interlocuteur. Ca peut paraître un peu rustre, mais je ne veux pas d’emmerdes. Il réitère alors sa demande auprès d’un de mes clients :

« Ca saute dans la cascade là ? Vous avez sauté vous ? »

- Non, on a regardé la cascade et on s’est branlé !

Je regarde, médusé, Jérôme, hilare, fier de sa connerie. Ca m’a plu, vous vous en serez douté ! Le touriste n’a pas demandé son reste et s’est barré sans crier gare…

T comme Téléphone

Trempé. Bidon étanche de merde. Ou inattention de merde, j’ai du mal à choisir. Le résultat est le même ! Je démonte mon téléphone portable, indispensable élément de sécurité, range la batterie, mets ma carte SIM à l’abri, et pose la coque sur le muret de Corsica Madness*, pour qu’elle sèche. Mon écran est criblé de gouttes, de l’intérieur ! Quel bel objet ! Qui pourrait avoir envie de ça ? Un crève la faim a pourtant profité d’un moment d’inattention de Jérôme* pour me voler cette partie de mon Siemens à 1€ vieux de deux ans… et qui ne marchait même plus ! A la limite je m’en serais foutu, si ce n’est que ce minable larcin m’a empêché d’avoir accès à mes messages. Un, en particulier, m’aurait intéressé : Sophie Di Sante, l’amie de Nico, basée à Ponte Leccia, avait vu que ma course avait été avancée d’un jour, et me le disait sur répondeur. Ma grande déception de l’été aurait été évitée…

samedi 11 novembre 2006

LPCMI 2006: R comme...

R comme Rater sa vie

Par une belle journée, j’arrive de canyon avec des clients, dans un Zonza* bouillonnant de vie. Les tables des cafés sont pleines à craquer, des touristes dégustent des coupes de glaces géantes, certains jeunes Corses se « montrent », cheveux gominés, lunettes sur le nez et gros cubes rutilants garées à proximité (un tel manque de discrétion me répugne !). Les gens déambulent nombreux dans la rue principale, s’offrant des produits locaux, feuilletant livres, choisissant quelques cartes postales. Notre devanture ne désemplit pas, les canyoneurs du jour, ravis, rangent leurs sacs non sans fierté devant des badauds qui, devenus curieux, s’intéressent, pénètrent dans le local, posent des questions, matent les photos. Mat, qui était déjà rentré de la Vacca*, venait d’achever de suspendre ses combinaisons et plaisantait avec ses clients. Une fin de journée idéale, quand on a bien travaillé. Jovial après une belle sortie, j’entre en trombe dans Corsica Madness* et interpelle une mère de famille, juge d’instruction de son état :

« Alors, ça vous a plu ? Il a été gentil Mathieu* ? »

- Oui, très bien, c’était super !
- Vous avez bien fait d’aller avec lui alors. Si vous avez trouvé ça super avec lui, avec moi vous auriez trouvé ça génial, vous seriez immédiatement tombée amoureuse de moi, vous vous seriez rendu compte que vous avez raté votre vie !

J’ai adoré cette connerie sur le coup. Je l’ai vite regrettée : la dame a mis fin à ses jours le lendemain** ...

R comme Rappels

Un matin au local. Mon groupe est là tôt, je suis prêt à décoller, il n’est pas 8h30. Me voici donc, une fois n’est pas coutume de bon matin, de fort bonne humeur. Je constate à regrets que c’est Mat qui a récupéré les deux buenasses qu’on avait inscrites la veille. Lucky boy. C’est lorsque l’une d’elle déclare avoir peur en rappels et avoir déjà pleuré à l’occasion d’un tel exercice que je me suis finalement dit que j’étais très bien avec mon groupe de mâles. Mat lui, commençait sans doute à se rendre compte qu’il allait passer une rude journée en fin de compte. Soudainement inspiré, je pris la parole, singeant comme à mon habitude lors d’un briefing (ou de consignes*) mon Maître absolu, le « Camelback à pisse », l’illustre Apremontois Manu Tessanne. Je dis à la jeune fille, du ton le plus dogmatique possible :

« C’est très simple. Si tu as peur en rappel*, voici ce qu’il faut faire : tu colles tes lèvres sur celles du moniteur, et tu aspires très fort : tu seras collée à lui et donc en sécurité. C’est bien clair ? »

Parti dans un grand éclat de rire, le Mat, pourtant si prompt à dire des horreurs en privé, ne savait plus où se mettre. Je quittai les lieux rapidement avec mon groupe, ayant hâte de retrouver mon collègue soir pour savoir s’il avait mis à profit cette connerie pour se rapprocher de sa belle cliente…



Un moment fort du canyon : les rappels. Du plaisir pour certains, du gros stress pour d’autres…

R comme Ravis

On serait tenté d’en douter, à la lecture des péripéties et gueulantes parfois poussées. Eh bien sachez que tous les clients que j’ai eu entre les mains ont été ravis. Il en a été de même pour mes deux acolytes, à l’exception d’une journée d’orage* mémorable où les clients étaient déjà bien contents de rentrer en vie, lors d’un repli magistralement orchestré par mes amis titulaires (je ne suis qu’un humble « stagos »). Presque toujours, nous avons bu un coup, mangé une glace, une crêpe, ou un panini ensemble, après l’effort. Mes clients m’ont toujours invité, et dans les rares cas où ils m’oubliaient, Caro ou Béa* m’offraient la conso. Une entente en bonne intelligence. Parfois, plus rarement, il est arrivé de toucher des pourboires. Le grand père de deux jeunes filles m’a un jour donné 10€, c’est mon record personnel. François a été quant à lui gratifié d’un bifton de 20€, offert par un couple Croate. Cocasse non ?

** Ceci est bien évidemment faux ! La dame se porte comme un charme !

mardi 7 novembre 2006

LPCMI 2006: P, Q comme...

P comme Poutre

Foutu grenier : l’accès est non éclairé, le plafond est super bas… Après m’être fracassé le crâne deux trois fois soit dans l’escalier, soit sur la poutre au dessus du micro ondes, je décide de jouer la prudence. Je monte un matin à quatre pattes, histoire de m’éviter un nouveau réveil douloureux et misérable. En haut des marches, je me relève, content de moi. Baaaaam ! Mon crâne rasé vient de s’encastrer sur une lourde poudre : j’ai mal du compter, il devait manquer une marche. C’est Foué* qui m’a rappelé cet épisode, il m’avait entendu hurler de violentes insultes à l’attention de ce plafond décidément bien bas…

P comme Pigeault

Le bellâtre, l’AMM le plus sexy de la région. Ou pas. Christophe est un personnage controversé, dont la légende prétend que sa voiture aurait été plastiquée. Au final, d’un point de vue personnel, nous nous entendions bien. Je veux dire par là qu’il me laissait obligeamment doubler son groupe sans rechigner ni faire de remarque, une fois qu’il s’était rendu compte que j’étais systématiquement plus rapide que lui (sans porter un quelconque jugement sur ses compétences, il avait, à sa décharge, souvent des groupes très chargés). Je crois que Mat et Foué*, également plus efficaces et le dépassant régulièrement, n’ont pas toujours entretenu de bons rapports avec cette montagne de muscles. Au final, je pense que c’est un type correct qui gagne sûrement à être connu.

P comme Petru

Petru : un vieil homme au visage buriné par le plein air, barbu comme pas deux, qui tient une auberge sur le magnifique plateau du Cuscione. Nous y avons dîné un soir tard, invités par Henri qui nous avait tous trimballés dans son PT Cruiser décapoté. Une vieille table en bois, de la viande et des légumes maison, une bouffe campagnarde à la bonne franquette, comme je les apprécie tant. Autour de la table, parmi la quinzaine de convives, « Pierrot », berger rustique de 72 ans, ami d’Henri, possède un passé riche en histoires. Conversant avec lui (parfois en Corse), j’ ai appris qu’il était au Conseil Général par chez nous, en Alesani, du temps de François Riolacci. La Corse est décidément bien petite. Henri aussi s’est mis à table ce soir là. Quelques anecdotes* croustillantes ont épicé le repas, celle de son éphémère rencontre érotique avec une belle dame dans un train de nuit rentrant d’Italie est digne de rentrer dans le répertoire inépuisable du Foué*…

P comme Perdre son 8

Cela m’est arrivé trois fois. C’est énorme non ? A la Vacca*, on mouline certains clients au saut de 9m et tous sans exception au rappel* de 12m. Ca va plus vite, et comme c’est très glissant, ils ne se blessent pas aux mains en se faisant rabattre sur le caillou après une zippette que leur mauvaise position de rappel* ne leur épargne qu’exceptionnellement. Les clients sont attachés au moyen d’une longe à une queue de vache en bout de corde. Ultra simple. Leur mousqueton à vis et leur 8 pendent donc entre leurs jambes, accrochés au pontet, parfaitement inutiles. Par trois fois, j’ai eu des clients qui, malgré mes injonctions (qui a dit insultes ?) hurlées depuis le relais, ont détaché leur 8, l’ont laissé couler dans la vasque, ont tenté de nager avant de se rendre compte qu’ils étaient toujours solidaires de la corde ! Et ce malgré des consignes* simplissimes :

« Tu arrives dans l’eau, tu enlèves ce mousqueton-ci de la boucle de corde, et tu nages ».

Ces boulettes avaient le don de me mettre hors de moi car je ne comprenais pas qu’on puisse faire quelque chose d’aussi absurde : c’est comme s’ils jetaient leurs clés au fond de l’eau ! Cela m’a en tous cas valu des descentes au masque pour récupérer le Matos. Une fois cependant, m’étant rendu compte de cette erreur trop tard dans le canyon, je n’ai rien retrouvé en sondant les lieux le lendemain matin.

Q comme Quilici

« L’omu di Bavedda ». La légende locale, le grimpeur aux centaines de voies dans les environs, l’homme aux topos innombrables sur le sud de la Corse, l’ami de Nicolas Hulot, l’icône de l’Alta Rocca. Un type attachant ce premier Guide de Haute Montagne* Corse, à l’humour pince sans rire dont je fus parfois la victime, mais ceci avec le plus grand plaisir. Mon ami Mathieu* Blanchard ne fut pas épargné non plus, lui à qui Jean Paul avait dit lorsqu’ils se rencontèrent pour la première fois :

« Au début, ne m’en veux pas : je ne te dirai pas bonjour, je veux d’abord voir comment tu travailles ! ».

Le tout avec un regard de fer que Mat osa à peine soutenir. Avant que Jean Paul ne se déride et de se mette à rigoler. Jean-Paul est comme ça. Il m’a aussi « macagné » à mon arrivée, me traitant de « pinzutu » à l’évocation de mon nom de famille. Il me taquinait de temps en temps gentiment avec ça quand nous nous saluions en langue Corse le matin, au départ d’un canyon. A 63 ans, l’homme au bandeau a encore sacrément la forme. Il est aussi bougrement rapide dans la progression de son groupe, on sent toute l’expérience du gaillard. Un jour où je lui collais aux miches avec un troupeau de clients habiles, étant bien plus rapide que J.P. dans le rappel* de 12m à la Vacca*, je lui cédais, grand prince, la priorité au saut du Polonais, par respect. Il me remerciait d’un clin d’œil. Comme tous les soirs, de passage au cabanon du Parc Aventures en bord de route du col de Bavella, assis dans la voiture d’un client, je m’arrête et ouvre la fenêtre pour saluer les collègues. Jean-Paul et Jean-Pi sont là, discutant et rangeant du Matos.

« Cumu sì o pinzutu ? » me lance un Jean-Paul taquin et souriant.

- Va bè ! Mais j’ai buté toute la journée sur un vieux guide* qui n’avançait pas avec son groupe…

Je lance un clin d’œil à l’homme à la barbe blanche impeccablement taillée et repars en direction de Zonza*, hilare. D’après Jean-Pi, Jean-Paul n’a rien dit, il était scotché. On s’est revus plusieurs fois en canyon, on a pas mal causé lors de la pause finale à la Vacca*. Il m’a confié entre autres être en train de terminer un nouvel ouvrage. Il faudra se procurer ce livre, pour découvrir d’autres aventures de cet incontournable bonhomme, et en outre le secret de son inséparable bandeau…


Quand La Légende rencontre Une légende… Jean Paul Quilici, premier Guide de Haute Montagne Corse et personnage haut en couleurs, au sens propre comme au figuré !

mercredi 1 novembre 2006

LPCMI 2006: O comme...

O comme Odette

« Bonjouuuuuuuuuuuuuuur ! » Elle a une voix frisant l’énervement, la matrone du Zampo, mais c’est une dame fort gentille, souriante, et accueillante. Ciao Odette ! Mention spéciale pour Louis qui, deux mois après « l’évanouissement » de Mat à la terrasse de son café, s’inquiète encore pour sa santé : sympa aussi !

O comme Orage(s)

C’est la crainte principale en canyon avec douze clients au cul. Et je dois dire que nous avons été particulièrement gâtés cette année. En juillet, la montagne Corse a essuyé 14 journées d’orage* contre une moyenne habituelle de… 2 ! C’est dire ! A mon arrivée à Zonza*, Mat et Foué* n’avaient à la bouche qu’un gros grain esssuyé à la Purcaraccia avec évacuation sur le sentier au péril de la foudre pour « la Masse », pendant que le jeune moniteur Blanchard fonçait dans la fissure de réchappe au grand rappel* du haut. Un moment épique et terrorisant à les entendre. Je n’allais pas tarder à goûter aux joies de ces furies naturelles moi-même…

Souvent cet été, une dégradation orageuse était annoncée « à partir de la mi-journée », pour reprendre l’expression fétiche de Météo France Ajaccio.

« Il faudra profiter de la montagne le matin. Forte évolution diurne. Dès la mi journée, le ciel se couvre et la tendance orageuse se précise. Fortes rafales de vent, averses violentes, grêle. Foudre intense. Attention à l’activité électrique… ». Nous l’avons entendue un paquet de fois cette rengaine. Parfois, nous avons annulé des journées, souvent nous sommes partis plus tôt, tous en direction de la Purca histoire de ne pas être coincé dans la section engagée de la Vacca*.


C’est sûr, avec un débit pareil, ça fait moins rire…



Il n’était pas rare que le ciel se charge rapidement, puis décharge pacifiquement, faisant croire à un orage qui n’arrivait finalement jamais. Un beau jour (ou plutôt un mauvais jour) cependant, les cumulonimbus tinrent leurs promesses : pas de quartier ! Ciel chargé dès 11h du matin, l’apocalypse s’est abattue sur nous vers midi. Mat et moi, nos deux groupes, unissons nos forces. Mat était en train de faire descendre du monde au dernier gros rappel* de la Purcaraccia. Je l’évite et redescend par le sentier avec mes clients, conseillant fortement à quelques grappes de touristes en pleine ascension de se barrer au plus vite. J’entends encore la phrase suivante, émanant d’une petite fille d’une huitaine d’années, nu pieds et en monokini :

« On va pas redescendre maintenant qu’on a tout monté hein Papa ? »
- Non non, ça va aller.

Et la petite famille de continuer son chemin, sous le grondement du tonnerre…
Au pied du rappel*, je récupère ceux du groupe de Mat qui sont déjà en bas. Je pars avec mon gros cheptel nouvellement constitué pour torcher en vitesse les deux derniers toboggans, dont le fameux « toboggan de la mort » qui fait la partie « frisson » de ce canyon. Seul, j’aurais filé, mais il faut bien contenter les clients. Mat nous rejoindra juste après avec les quelques personnes qui étaient encore sur les cordes lors du déclenchement des hostilités.

La foudre s’abat de plus en plus près de nous, dans un vacarme toujours plus assourdissant. Le ciel est noir, il tombe des cordes, il se met à grêler. Nous filons nous mettre à l’abri sous le gros bloc protecteur situé à la fin de la partie haute du canyon, en rive droite. Bientôt, nos deux groupes sont en sécurité, et nous sommes rejoints par Patrice, un autre moniteur, et ses clients.

Tout le monde a gardé sa combinaison, donc personne n’a trop froid. Une bonne ambiance s’installe, les gens discutent, mangent, rient. Ils sont en sécurité. En vingt minutes à peine, le ruisseau de Purcaraccia est méconnaissable. Les aiguilles de granite compact et étanche ont fait déversé des tonnes de flotte, des canyons se sont crées de partout : le niveau d’eau monte très rapidement. Nous savons que quelques randonneurs sont encore coincés au dessus, soit par manque de temps pour descendre, soit par imprudence « délibérée ». Maintenant que nos clients sont hors de danger, Mat, Patrice et moi décidons de remonter chercher ces imprudents. Nous repartons, une corde autour du cou, vers le haut du canyon. Traverser la rivière est déjà un peu problématique pour nous, le courant a tellement forci ! On imagine déjà le retour avec les touristes…

En redécouvrant le canyon au pas de course sous la tempête, on a le temps d’évaluer les ravages causés en une demi heure : le débit est multiplié par 100 ! La grande dalle de la seconde cascade s’est transformée en immense rideau d’eau, la section de blocs entre le premier grand rappel* et le toboggan « chenille » n’existe plus : c’est désormais une immense marmite grisâtre ! Le débit dans le boyau ne donne pas envie d’y faire un tour, les cascades sont d’une rare violence. Dans le rappel arrosé*, au niveau du replat, un jet surpuissant part à l’horizontale et vient s’écraser dans la conque granitique, 10m à gauche : impressionnant ! Le piège se refermerait facilement sur les téméraires qui s’aventureraient dans de telles conditions dans le canyon.

Nous séparant au fil des rencontres, nous retrouvons au total une quinzaine de « naufragés », arc boutés sous les arbustes, frigorifiés et terrorisés. Les enfants tremblent de froid et pleurent, tout comme certaines mamans. Les pères ne font pas les fiers à bras… Je retrouve la petite famille à qui j’avais fortement conseillé de descendre, alors que je menais mon groupe tambour battant vers la sortie du canyon. Je ne comprendrais jamais pourquoi des touristes en sandales et non expérimentés ne se doutent de rien quand trois groupes de professionnels équipés s’enfuient en leur conseillant d’en faire autant…

« Vous avez bien fait de rester, hein, finalement ! »

lance-je, avec humour noir, au père de famille, penaud. Les inconscients ne se font pas prier pour me suivre, heureux de ne plus être seuls. Mat, de son côté, a également repêché une famille de cinq, quant à Patrice, il a enveloppé une gamine devenue bleue de froid dans sa couverture de survie. Nous regagnons ensemble le lit de la rivière, où j’installe une corde pour traverser. Mat et Patrice, portant des enfants, s’avancent, pendant que les touristes, pendus à la corde, tentent de ne pas se faire embarquer par le courant, avec de l’eau montant par endroits jusqu’au bide (où l’on se trempait à peine les pieds le matin même). Tout le monde arrivera à bon port sous le bloc.

Une heure et demi plus tard, lors d’une accalmie, nous retendrons une corde pour repasser rive gauche et filer sur le sentier de retour. Deux pompiers grassouillets restés sagement près de leur camion ont envoyé Seb, un autre BE, muni d’une radio, voir si tout allait bien ! Nous leur affirmons que tout est ok, le secteur est « nettoyé ». Un bon souvenir finalement pour nos clients, une bonne leçon pour les imprudents, et une certitude pour nous : « Quand l’orage tonne, si tu restes, tu déconnes ».